Nous venons de passer ce qui aurait été le 15e jour du cycle 3, une journée qui devait inclure une chimiothérapie pour Harper. Mais suite à une réaction grave à l’un de ses médicaments, les médecins ont décidé d’interrompre cette partie du traitement. Nous sommes donc entrés dans une période de repos et de convalescence, en attendant le début du cycle 4.

Hier, nous avons abordé cette journée pleins d’espoir, pensant enfin pouvoir rentrer à la maison. L’idée de retrouver notre foyer, la douceur de notre lit, le murmure rassurant de la vie quotidienne – c’était presque palpable. Mais en un instant, nos espoirs se sont effondrés. Le taux d’hémoglobine d’Harper était trop bas et elle avait besoin d’une nouvelle transfusion de plaquettes.

 Puis sa température est remontée en flèche. Même si ses analyses avaient été normales, la fièvre à elle seule nous aurait obligés à rester à l’hôpital. Ce fut un véritable coup de poing en plein cœur. Une leçon dure et douloureuse : il ne faut pas miser sur une seule chose. C’est la réalité du parcours : les plans peuvent changer en un instant, et il faut s’adapter vite, sinon on est emporté par la tempête des émotions.

En ce moment, outre ses analyses de sang, Harper souffre de fortes douleurs dues à la chimiothérapie qui continue de s’éliminer de son organisme. En quittant son corps, elle irrite sa peau, provoquant des éruptions cutanées douloureuses, des brûlures et des plaies ouvertes. Aller aux toilettes devient un véritable calvaire. On pourrait penser : « Ce n’est qu’une irritation cutanée », mais dans ce parcours, ces moments sont cruciaux ; ils vous mettent à l’épreuve d’une manière inimaginable.

Entendre son enfant hurler de douleur, pleurer et vous dire de « laisser tomber » ou de « vous me faites mal » alors que vous essayez simplement de l’aider… c’est déchirant. Bien sûr, elle ne le pense pas, mais ça fait quand même mal. Voir son enfant si impuissant, si petit et vulnérable face à la souffrance, c’est insoutenable. C’est un chagrin unique qui ne s’estompe jamais, même après l’avoir vue se battre courageusement à maintes reprises.

Nous partageons ces nouvelles non pas pour susciter la pitié, et encore moins pour faire des comparaisons. C’est une façon de documenter l’histoire d’Harper et notre parcours de parents, et de tenir informés ceux qui nous sont chers. Le chemin de chaque enfant atteint d’un cancer est unique, et aucune histoire ne devrait être comparée à une autre. Chaque larme, chaque blessure, chaque petit triomphe est unique et précieux.

Quand Harper est allongée sur son lit d’hôpital, recroquevillée contre les draps, je repense aux premiers jours, quand les médecins ont annoncé le diagnostic. La peur, la confusion, l’impuissance totale… c’était comme être emportée par une vague qui refusait de me lâcher.

Depuis, chaque jour apporte son lot de défis : des premières injections aux longs séjours à l’hôpital, en passant par l’angoisse constante des effets secondaires des médicaments. On pourrait croire qu’une fois le premier obstacle franchi, la vie devient plus facile. Mais chaque étape comporte son lot d’épreuves, non moins difficiles que la précédente.

L’irritation cutanée due à la chimiothérapie a rendu Harper craintive d’aller aux toilettes, et chaque changement de couche devient un combat entre la douleur et la patience.

 Parfois, elle ferme les yeux très fort, serre les lèvres et essaie de ne pas pleurer, mais les sanglots s’échappent malgré tout, et cela nous brise le cœur. Chaque fois que nous la lavons et la changeons, nous nous sentons à la fois impuissants et déterminés. Nous devons le faire, pour la protéger des infections, pour préserver sa santé.

Dans ces moments de calme, quand Harper s’endort enfin dans nos bras, je vois dans ses petits yeux un courage rare, même chez les adultes. Son corps est faible, épuisé par la douleur, mais son esprit refuse de céder. Elle esquisse de faibles sourires à la vue d’un jouet que nous lui avons apporté pour égayer ses longues journées à l’hôpital. Ces petits sourires, si fugaces soient-ils, nous donnent de la force ; ils nous rappellent pourquoi nous devons continuer, pourquoi abandonner n’est jamais une option.

Nous avons aussi beaucoup appris sur la patience et sur notre propre force intérieure. Avant tout cela, planifier, organiser, penser à l’avenir semblait simple. Mais vivre dans la réalité d’un hôpital, de la chimiothérapie, des changements constants, rend tout fragile.

On apprend à lâcher prise sur ce qu’on ne peut contrôler, à vivre avec l’incertitude, à attendre des jours meilleurs. Parfois, quelques heures de paix suffisent – ​​Harper dormant profondément, sans fièvre ni douleur – pour éprouver une immense gratitude.

Hier, quand notre projet de rentrer à la maison a capoté, nous avons pleuré. Non pas pour nous, mais pour elle, pour les épreuves qu’elle endure. Puis nous avons pris une grande inspiration, nous nous sommes tenus la main et nous nous sommes rappelés que chaque jour qui passe est une petite victoire.

 Chaque fièvre qui baisse, chaque taux sanguin qui se stabilise, chaque brûlure ou éruption cutanée qui s’atténue légèrement… ce sont autant de victoires qui méritent d’être reconnues.

Nous espérons toujours pouvoir rentrer à la maison au moins deux jours la semaine prochaine. Même quelques jours seulement – ​​revoir les recoins familiers de notre maison, laisser Harper jouer par terre plutôt que dans son lit d’hôpital, lui préparer un repas, retrouver le rythme d’une vie de famille normale – ce sont des objectifs importants. Nous avons appris à chérir les petits moments, les rires discrets, les repas sans perfusion ni bourdonnement de machines.

À travers tout cela, nous comprenons que ce parcours n’est pas seulement celui d’Harper, il est aussi le nôtre. C’est le parcours de parents qui apprennent à aimer et à protéger inconditionnellement, à vivre dans l’incertitude et à trouver la joie même dans les moments les plus sombres.

 Nous savons que de nombreux défis nous attendent encore — de longues journées, des nuits blanches, plus de souffrance, plus de larmes — mais nous savons aussi que la résilience et l’amour humains sont sans limites.

Nous consignons ces jours non pas comme des plaintes, mais comme des témoignages, des rappels que chaque instant, même les plus douloureux, fait partie de l’histoire. L’histoire d’Harper, l’histoire d’une enfant courageuse, de parents qui ne la quitteront jamais, pas une seconde. Chaque fois que nous plongeons notre regard dans ses petits yeux, nous y voyons la raison de continuer, l’espoir d’un avenir – un avenir qui, bien qu’encore incertain, est plein d’amour et de promesses.

Alors on vit au jour le jour, heure après heure, instant après instant. Il n’y a pas de magie éternelle, mais les moments de paix, les petits sourires, les étreintes qui restent gravées dans nos mémoires… voilà la vraie magie à nos yeux.

 Et nous poursuivrons ce chemin, avec patience et force, en espérant le jour où nous pourrons rentrer à la maison, voir Harper courir sur le sol et l’entendre rire — vraiment rire, sans douleur, sans peur.

Nous croyons que, quelles que soient les difficultés, l’amour et la persévérance nous guideront. En attendant, nous continuerons d’écrire cette histoire, chapitre après chapitre, page après page, pour ne jamais oublier le courage d’Harper et tout ce qu’elle nous a appris sur le courage, la patience et l’amour inconditionnel.