Clash en direct : Michel Onfray met à mal un plateau pro-Macron, sidération en studio.

L’atmosphère était électrique. Les lumières du plateau de télévision brillaient, mais l’onde de choc qui l’a traversé était bien plus vive que l’éclat des projecteurs. Lorsque Michel Onfray, le philosophe iconoclaste, a pris la parole face à une assemblée manifestement acquise à la cause macroniste, il n’a pas simplement participé à un débat : il a mené une charge frontale, transformant l’interview en un véritable tribunal des idées. Sa verve, incisive et passionnée, a déconstruit point par point les fondements de la politique actuelle, exposant la profonde fracture qui sépare le pouvoir d’État et le peuple français. Ce n’était pas un simple « clash », c’était une radiographie brutale de la crise démocratique française, menée par un homme qui refuse de se contenter des demi-vérités.
La Légitimité Érodée : Quand le Président « Emmerde » le Peuple
Le point de départ de l’offensive d’Onfray fut la question fondamentale de la légitimité d’Emmanuel Macron. Pour le philosophe, la présidence actuelle souffre d’un vice originel : le mépris. Il a rappelé sans détour la phrase tristement célèbre du chef de l’État sur son désir d’« emmerder » une partie de la population française, la qualifiant d’attitude anti-républicaine. Un Président de la République, insiste Onfray, est celui qui rassemble ou qui, à défaut de majorité claire, tire les conclusions qui s’imposent.
« Il a juste pas compris que il y a une sociologie de la France à l’Assemblée nationale et qu’on ne dit pas je les emmerde », a-t-il lancé, dénonçant une culture politique qui choisit de marginaliser et de mépriser une partie du corps social.
L’argument de la réélection, souvent brandi comme un bouclier par les partisans du gouvernement pour justifier la réforme des retraites, a été pulvérisé par une analyse électorale sans concession. Onfray a rappelé que cinquante pour cent des Français ne se sont pas rendus aux urnes et que Macron a été réélu, de facto, « par défaut ». Cette victoire, selon lui, n’est pas un plébiscite, mais le fruit d’une stratégie éprouvée : laisser prospérer l’extrême droite pendant cinq ans pour ensuite agiter le spectre du nazisme et du fascisme un mois avant le second tour. Les électeurs, contraints de choisir entre deux maux, ont voté « contre », et non « pour » la politique d’Emmanuel Macron. Cette réalité électorale, loin d’être une force, est la source d’une faiblesse institutionnelle abyssale.
L’Ultimatum du Référendum : Le Seul Gage de Véritable Légitimité
Face à ce qu’il qualifie de manque de légitimité populaire et législative, Michel Onfray a proposé une solution radicale et inattaquable sur le plan démocratique : le référendum. Pour lui, si le Président est sincère et sûr de son projet, il n’a qu’une seule chose à faire pour asseoir sa légitimité : consulter directement le peuple sur la réforme des retraites.
Il s’agit d’un choix de société fondamental. Vouloir faire travailler les Français plus longtemps, alors que le travail lui-même est devenu une source de souffrance et de fatigue, ne peut être imposé par la seule volonté exécutive. En refusant le référendum, Macron se positionne, selon Onfray, dans la lignée du « coup d’état des élus politiques » de deux mille cinq, lorsque les Français ont dit « non » au traité européen pour s’entendre répondre en deux mille huit qu’ils l’auraient « tout de même ». Ce déni de démocratie directe est, aux yeux du philosophe, la source d’une fatigue généralisée et d’une dépolitisation profonde.

Le référendum, à l’image du général de Gaulle qui s’en remettait au jugement du peuple, serait l’acte qui permettrait au Président de restaurer le contrat social. Il pourrait dire : « Je vais au-devant du peuple et je lui demande ». Le fait qu’il ne le fera jamais est la preuve la plus éclatante, selon Onfray, que le gouvernement sait qu’il joue contre la volonté populaire.
Au-Delà de la Réforme : La Misère des Salaires et la Fatigue Psychique
L’affrontement sur les retraites est, pour Onfray, la partie visible d’un mal plus profond. La colère qui s’exprime dans la rue, ce n’est pas uniquement le refus de deux années de travail supplémentaires, c’est une « fatigue généralisée » qui s’accumule depuis des années.
Le philosophe a humanisé le débat en rappelant la réalité de ceux qui travaillent dans des conditions effroyables. Il a cité l’exemple de son entourage dont les proches travaillent « dans des entrepôts frigorifiques où il fait moins vingt-trois degrés », des emplois où l’on ne peut décemment pas continuer jusqu’à un âge trop avancé.
Mais la pénibilité n’est pas uniquement physique. Onfray a introduit une dimension cruciale souvent ignorée par les technocrates : la fatigue psychique. Évoquant les jeunes filles aux caisses de supermarché, un travail « pas très intéressant », ou les postes « ultra répétitifs » où l’on s’ennuie, il a martelé : « il y a une espèce de fatigue psychique, il y a pas que la fatigue du dos cassé ». Il s’agit de repenser le travail à l’ère du télétravail et d’Internet, pour le rendre « à la carte », respectant ceux pour qui le labeur est une souffrance et non une passion.
En filigrane, Onfray dénonce la misère des salaires. Comment peut-on vivre avec des « salaires de misère » ? Ce mépris de l’oligarchie se traduit par le rejet systématique de quiconque parle au nom du peuple, immédiatement taxé de « populiste », de « démagogue », d’« extrémiste », pour l’injonction à ne pas penser pour le peuple, par le peuple.
Le Chaos Institutionnel : L’Illégitimité à l’Assemblée
La déroute du gouvernement ne s’arrête pas à la rue, elle se prolonge dans l’enceinte sacrée de l’Assemblée nationale. Le Président a perdu les élections législatives et se retrouve sans majorité absolue. Selon Onfray, c’est un point de non-retour pour la légitimité du pouvoir exécutif. Un véritable homme d’État, dans l’esprit de la Cinquième République, aurait « tiré les conclusions » et remis son mandat en jeu.
Au lieu de cela, le gouvernement choisit la tactique de l’ostracisme. Le philosophe dénonce la manœuvre qui consiste à déclarer illégitimes et dangereuses la NUPES et le Rassemblement National, bien que représentatifs d’une large part de l’électorat, pour justifier de « faire sans eux ». L’objectif, selon lui, est de construire une majorité artificielle en monnayant le soutien des Républicains, décrits avec causticité comme « à vendre pour un plat de lentille ».
Cette méthode, faite de « duplicité » et de propositions faites pour être lâchées en cours de route (comme le passage à soixante-quatre ans au lieu de soixante-cinq ans), révèle une négociation cynique et non constructive. Le débat s’écarte de l’intérêt supérieur des Français pour devenir un jeu politique où les institutions sont instrumentalisées.
Face à l’argument selon lequel l’Assemblée nationale est légitime même sans majorité absolue, Onfray persiste : c’est le travail du chef de l’État de composer avec cette réalité, non de la contourner ou de la dominer. Le vrai chef d’État se mettrait « au service du peuple ». Il ferait une synthèse des propositions de tous (RN, NUPES, LR) pour bâtir un texte d’entente nationale. Le refus de cette approche, calquée sur une « culture plutôt allemande » de négociation constructive en amont, c’est le choix de la division.
Conclusion : La Société en Rupture et l’Urgence d’une Nouvelle Pensée Politique
L’intervention de Michel Onfray est un signal d’alarme retentissant. Elle révèle une société française au bord de la rupture, non pas à cause d’un énième conflit social, mais à cause d’une « crise démocratique » profonde. Le système, que ce soit les institutions jugées « trop froides » et lentes ou la classe politique elle-même, n’est plus « homogène » avec une population qui change rapidement et qui exprime son désaccord par millions dans la rue.
Le mépris qui a caractérisé le premier quinquennat de Macron — où le Président a continué sa politique sans écouter un seul instant les doléances populaires, même durant la crise du Covid, gouvernant « comme un maréchal soviétique » selon Onfray — a conduit à la situation actuelle.

Le message du philosophe est clair et s’adresse directement à la jeunesse, aux travailleurs, et à tous ceux qui se sentent dépossédés de leur parole : il est temps de redéfinir le contrat social français. Il faut une nouvelle « philosophie du travail », et surtout, des élus qui comprennent qu’ils sont au service du peuple, et non l’inverse. L’onde de choc laissée par son intervention sur le plateau témoigne de la puissance de ce discours. Elle force chacun à regarder au-delà de la simple loi pour interroger la nature même de notre République.
Ce débat n’est pas terminé, mais Michel Onfray a réussi l’exploit de redonner un langage, précis et percutant, à la colère, à l’injustice, et à la fatigue de millions de Français. Son cri d’alarme résonne désormais bien au-delà des studios de télévision.
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