Après la mort du petit Bryann, ses parents veulent comprendre comment il s’est étouffé avec une banane à la crèche

Un enfant de 20 mois est décédé vendredi 28 mars à l’hôpital, une semaine après avoir fait une « fausse route » en avalant un morceau de banane à la crèche des P’tits Pirates au Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine).

Agé de 20 mois, le petit Bryann a perdu la vie vendredi 28 mars une semaine après avoir avalé de travers un morceau de banane lors de son repas de midi à la crèche municipale Les P'tits Pirates au Plessis-Robinson. DR

« J’ai fait la promesse à mon fils de comprendre les circonstances exactes dans lesquelles il était décédé afin d’éviter qu’un tel drame se reproduise à l’avenir. » Laurent Mayeuf veut comprendre comment son fils Bryann a perdu la vie, à l’âge de 20 mois, après une fausse route alimentaire alors qu’il était sous la garde des employés de la crèche municipale des P’tits Pirates, au Plessis-Robinson. L’enfant venait d’avaler un morceau de banane, la fausse route a provoqué une asphyxie qui lui a coûté la vie une semaine plus tard.

Ce vendredi 21 mars, le père de Bryann reçoit un coup de fil de la crèche dans laquelle son fils est gardé depuis qu’il a cinq mois. « J’ai été prévenu que nous devions venir de toute urgence car mon fils avait fait une fausse route avec un morceau de banane à la fin du repas de midi, et qu’il avait été en arrêt cardio-respiratoire durant vingt-cinq minutes. Quand je suis arrivé, il venait d’être réanimé par les secouristes et était sur le point de partir vers l’hôpital avec les pompiers », retrace ce papa dévasté, la gorge serrée par l’émotion.

C’était une journée ordinaire, rythmée par les rituels rassurants de la petite enfance. Un matin comme les autres, où des parents confient ce qu’ils ont de plus précieux à des professionnels, dans un lieu qu’ils croient être un sanctuaire de sécurité : la crèche. Pour les parents du petit Bryann, ce sanctuaire est devenu le théâtre d’un drame impensable. Leur fils ne rentrera jamais à la maison. La cause de cette tragédie, aussi banale que terrifiante : une banane.

Le petit Bryann est décédé, étouffé en mangeant ce fruit au goûter. Un événement qui dépasse l’entendement, un scénario que l’esprit refuse de concevoir. Aujourd’hui, au-delà du deuil qui les consume, les parents de Bryann sont habités par une question unique, une obsession qui hante leurs jours et leurs nuits : “Comment ?”

Comment un aliment aussi banal, aussi doux, aussi universellement donné aux tout-petits, a-t-il pu devenir une arme mortelle ? Comment, dans un environnement supposé être le plus surveillé et le plus sécurisé pour les enfants en bas âge, un tel drame a-t-il pu se produire ?

Pour ces parents, le deuil est en suspens, suspendu à cette quête de vérité. Ils ne cherchent pas seulement des condoléances ; ils exigent des explications. C’est le début d’un combat long et douloureux, non seulement pour obtenir justice pour leur fils, mais aussi pour s’assurer qu’un tel “accident” ne se reproduise jamais.

L’appel qui a fait basculer leur monde

Ça ne doit pas arriver”: un enfant meurt à la crèche en s'étouffant avec  une banane | 7sur7.be

Rien ne peut préparer un parent à recevoir l’appel que les parents de Bryann ont reçu ce jour-là. Un appel qui commence par l’urgence, la panique dans la voix, et qui se termine par un silence assourdissant. Apprendre que son enfant a eu un problème. Puis, l’horrible confirmation : il s’est étouffé. Malgré l’intervention des secours, il n’a pas pu être réanimé.

Le choc initial laisse place à une incompréhension totale. Une banane ? À la crèche ? L’esprit s’emballe. Les questions fusent, se bousculent dans une spirale de douleur. Bryann était-il seul ? Le personnel était-il formé aux gestes de premiers secours ? Combien de temps s’est-il écoulé avant que quelqu’un ne remarque qu’il s’étouffait ? Et cette banane, comment était-elle préparée ?

C’est là que réside le cœur du problème. Une banane, pour un adulte, est l’incarnation même de l’aliment facile. Pour un enfant en bas âge, qui n’a pas encore toutes ses dents ou le réflexe de déglutition parfaitement maîtrisé, c’est un risque connu des professionnels. Les directives de sécurité alimentaire pour la petite enfance sont claires : les aliments doivent être adaptés. Les bananes, si elles sont données en rondelles, peuvent parfaitement épouser la forme de la trachée d’un jeune enfant et créer un “bouchon” hermétique. Les experts recommandent de les couper en bâtonnets, dans la longueur, ou de les écraser.

Les parents de Bryann veulent savoir : la crèche suivait-elle ces protocoles ?

La quête de la vérité face au mur du silence

Dans les jours qui suivent le drame, la crèche devient une forteresse. C’est souvent le cas. Entre le choc du personnel, lui-même traumatisé par l’événement, et l’ouverture d’une enquête officielle, la communication se fige. Les avocats et les assurances entrent en jeu, et les réponses humaines et compatissantes que les parents recherchent désespérément sont remplacées par des déclarations prudentes et des silences procéduraux.

Pour les parents de Bryann, ce silence est insupportable. Il alimente le doute, la suspicion, et la colère. “Nous ne disons pas que c’est intentionnel,” ont-ils tendance à expliquer, la voix brisée. “Nous voulons juste savoir. Nous avons le droit de savoir.”

Une enquête a été ouverte, comme c’est la procédure standard en cas de décès d’un mineur dans un établissement d’accueil. Les enquêteurs vont devoir reconstituer minute par minute le fil de cet après-midi tragique. Combien d’enfants y avait-il par adulte ? Le taux d’encadrement légal était-il respecté ? Le personnel présent avait-il les qualifications requises ? Les protocoles d’urgence ont-ils été suivis à la lettre ?

L’autopsie du petit Bryann fournira des éléments cliniques, mais elle ne répondra pas à la question de la responsabilité humaine. Elle confirmera la cause du décès – l’asphyxie par obstruction – mais elle ne dira pas si cette obstruction est le fruit d’une négligence ou d’une tragique et imparable fatalité.

Le “faux-ami” : Quand la nourriture devient un danger

Ce drame met en lumière une réalité que beaucoup de jeunes parents découvrent avec anxiété : les risques d’étouffement chez les moins de trois ans. Les statistiques sont alarmantes. L’étouffement est l’une des principales causes de décès accidentels chez les jeunes enfants. Et les aliments sont en tête de liste des coupables.

La banane, le raisin, la saucisse type “Knacki”, les tomates cerises, les noix… la liste des aliments à risque est longue. Ils ont en commun cette forme ronde et cette texture qui peuvent facilement bloquer les voies respiratoires encore étroites d’un enfant.

La tragédie de Bryann soulève une question plus large sur la formation du personnel de la petite enfance. Connaissent-ils tous parfaitement ces risques ? Sont-ils tous formés et re-formés régulièrement aux gestes qui sauvent, comme la manœuvre de Heimlich adaptée aux nourrissons et aux jeunes enfants ? Dans l’urgence, dans la panique de voir un enfant devenir bleu, le bon geste est-il instinctif ?

L’enquête devra déterminer si la crèche de Bryann avait mis en place toutes les mesures préventives. Avait-elle un plan d’action clair pour les repas ? La préparation des aliments était-elle standardisée et contrôlée ?

Une communauté sous le choc

L’onde de choc ne s’est pas arrêtée aux portes de la famille de Bryann. Elle s’est propagée à tous les autres parents de la crèche. L’horreur est soudainement devenue concrète. La confiance, ce pilier essentiel de la relation entre parents et structure d’accueil, est brisée.

Du jour au lendemain, les autres parents regardent le personnel avec suspicion. Ils posent mille questions. Ils inspectent les repas. Certains, pris par la peur, retirent leur enfant de l’établissement, même si cela signifie désorganiser toute leur vie familiale et professionnelle. La peur est irrationnelle, mais elle est surtout profondément humaine. “Et si c’était arrivé à mon fils ?”

Le personnel de la crèche, lui aussi, est en deuil. Il est probable que les puéricultrices et auxiliaires qui s’occupaient de Bryann soient dévastées. Elles ont choisi ce métier par amour des enfants. Vivre un tel drame est une cicatrice à vie. Elles sont elles-mêmes prises entre leur propre chagrin, la peur des conséquences judiciaires, et le regard accusateur des autres parents.

Le deuil impossible et le combat pour les autres

Les parents de Bryann sont entrés dans un long tunnel judiciaire et administratif. Mais leur combat dépasse désormais leur propre douleur. Ils l’ont dit : ils veulent comprendre pour que la mort de Bryann ne soit pas “juste” un accident statistique. Ils veulent que des changements s’opèrent.

Si l’enquête révèle une faille dans les protocoles, une négligence dans la supervision, ou un manque de formation, ils se battront pour que les réglementations soient renforcées. Pour que la préparation des aliments dans toutes les crèches de France soit soumise à des normes non négociables. Pour que la formation aux premiers secours pédiatriques soit une priorité absolue et constante.

Leur chagrin est devenu une force motrice. Ils portent la voix que Bryann n’a plus. Ils se battent pour que le “comment” obtienne une réponse, non pas pour apaiser leur peine – car rien ne le pourra jamais – mais pour honorer la mémoire de leur fils en protégeant les enfants des autres.

Aujourd’hui, l’enquête suit son cours. Les parents de Bryann attendent, suspendus aux conclusions des experts. Ils attendent de savoir si leur enfant est mort à cause d’une banane, ou si c’est le système qui l’a laissé s’étouffer. Quelle que soit la réponse, leur vie est brisée. Mais dans leur quête de vérité, ils font preuve d’un courage qui force l’admiration, transformant leur pire cauchemar en un combat pour la sécurité de tous.