En avril 1982, Romy Schneider, au cœur du pire drame de sa vie, a voulu s’exprimer et accuser un journal d’avoir choisi les Champs-Élysées pour sa photo. Cette Viennoise germanophone, qui m’accompagnait parfois sur le tournage de Romy [Music], venait de perdre son petit garçon, décédé tragiquement douze ans auparavant. Un journal avait alors publié la une la plus horrible que j’aie jamais vue de ma carrière : la une avec le corps de son enfant à la morgue.

Au moment du tournage de Ruffiot, un passant m’a interpellé d’un ton indifférent : « C’est Michel. Je voudrais dire quelques mots à ceux qui ont osé prendre cette photo et à ceux qui ont osé la publier dans un grand magazine. » J’ai répondu : « Pas de problème. » J’étais encore à l’Espace Cardin et elle est venue voir Michel. Pendant la préparation de cette émission, elle m’a dit que je voulais tourner un peu moins pour essayer de réussir ma vie, et que c’était parfois très difficile à concilier avec le métier d’acteur, surtout à ce niveau. J’aimerais m’intéresser davantage à ma vie personnelle, à ma vie privée, c’est vrai, mais

pour réussir ma vie privée, je ne suis peut-être pas seule. D’ailleurs, je ne le suis pas, mais surtout, on me laisse tranquille au final, surtout quand on sait ce que certains enfants peuvent faire. Je pense que le public a le droit de savoir qu’en tant qu’infirmière, prendre une putain de photo a été achetée par un journal, et quel journal l’a mise en une, en demandant où était l’éthique, où était la délicatesse ? C’était sa dernière interview, elle était un peu triste après ça. C’était la première fois que quelqu’un m’appelait à répondre à la presse populaire devant 7 millions de téléspectateurs, dans une émission qui n’était pas secrète. C’était un moment des Champs-Élysées que j’ai tellement marqué, qui nous a tous marqués. C’était un moment historique. L’histoire des Champs-Élysées était incroyable. [Musique]