Sous le ciel chaud et étoilé de Ramatuelle, samedi 9 août 2025, la scène du théâtre de Verdure a vibré d’une énergie rare. Pour la troisième fois de sa carrière, Laurent Voulzy s’y produisait, offrant au public un voyage musical entre nostalgie et douceur, porté par cette voix reconnaissable entre mille. Mais cette édition du 41e Festival de Ramatuelle avait une saveur particulière : à ses côtés, partageant la lumière des projecteurs, se tenait Isaure Le Faou, sa compagne et partenaire artistique, de trente-six ans sa cadette. Un duo inattendu pour certains, mais qui, sur scène, ne laissait place à aucun doute : leur complicité est réelle, palpable, presque magnétique.

Le festival, fondé et toujours présidé par Jacqueline Franjou, est habitué aux grands noms. Après M, Alex Lutz ou encore Philippe Lellouche, c’était au tour de l’interprète du Soleil Donne de captiver les spectateurs. Parmi eux, des fidèles de l’événement comme Bernard Montiel, installé non loin. Quelques heures avant le concert, dans les colonnes de Nice-Matin, Laurent Voulzy confiait ressentir ici « quelque chose de particulier, de paisible, d’élégant », comme si ce décor azuréen, avec ses pins et ses senteurs d’été, entrait en résonance avec ses mélodies. Un lieu qu’il connaît bien : il y avait déjà chanté en 2004 puis en 2012, mais cette fois, l’histoire s’écrivait autrement.

Car depuis un peu plus d’un an, Laurent Voulzy partage sa vie avec Isaure Le Faou. Et si leur différence d’âge – trente-six ans – fait tiquer certains, elle semble ne pas les effleurer. Leur langage se passe de mots : il se lit dans un regard échangé, dans un sourire retenu au milieu d’une chanson, dans la façon dont ils se laissent mutuellement l’espace et le temps de briller. Lors des répétitions, déjà, on percevait cette fluidité entre eux. Sur scène, elle est devenue évidence. Isaure, à la silhouette gracile et au timbre délicat, a interprété un titre dont elle a signé les paroles, sur une musique de Michel Amsellem, complice de longue date de Laurent. Puis elle est revenue pour un duo avec lui, pioché dans son répertoire, comme pour tisser un fil invisible entre leurs univers musicaux.

Quant au chanteur, fidèle à lui-même, il a déroulé une sélection de ses incontournables : Belle-Île-en-Mer, Marie-Galante, Le pouvoir des fleurs, autant d’hymnes poétiques capables de suspendre le temps. Entre ballades rêveuses et refrains lumineux, il a prouvé qu’à 76 ans, il possède toujours ce talent rare : transporter toute une salle en quelques notes. « Une voix, des mélodies, et toute une salle transportée… Laurent Voulzy, tout simplement magique », a résumé le compte officiel du Festival de Ramatuelle sur Instagram. Une performance d’autant plus admirable que l’artiste a subi, il y a quelque temps, une opération de la moelle épinière. De quoi donner un supplément d’âme à cette soirée, où chaque note semblait pesée, offerte, presque fragile mais toujours juste.

Leur présence à deux n’est pas un simple hasard de tournée. Cet été, Laurent et Isaure passent beaucoup de temps ensemble à Beaulieu-sur-Mer, entre moments de travail et parenthèses de détente. L’image qu’ils renvoient n’est pas celle d’un couple cherchant à provoquer : c’est celle de deux artistes qui se sont trouvés et qui avancent dans la même direction, malgré le bruit autour. Le 17 juillet dernier, ils étaient apparus ensemble aux obsèques de Thierry Ardisson, unis dans le recueillement. Et, loin des apparences, c’est Isaure qui a récemment convaincu Laurent de se lancer dans un projet qu’il refusait depuis longtemps : écrire son autobiographie.

« Cette fois, Isaure a su trouver les mots », rapportait Nice-Matin. Une phrase qui en dit long sur l’influence douce mais déterminée qu’elle exerce sur lui. Le chanteur, père de quatre garçons – Julien, Nicolas, Cliff et Quentin, nés de ses unions passées avec Betty et Mirella – confie que ce travail d’écriture le pousse à revisiter son passé, parfois lumineux, parfois plus tourmenté. « Ça me fait réfléchir profondément sur ce que je suis. Sur la vie que j’ai eue, sur mon enfance… On marche forcément sur les traces de notre enfance. »

Son enfance, justement, n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. « J’étais souvent dans des endroits différents parce que ma mère ne pouvait pas s’occuper de moi tout le temps. Elle faisait de la danse, donc j’étais un peu trimballé de-ci, de-là », raconte-t-il avec cette voix douce qui rend ses confidences encore plus touchantes. Derrière le sourire lumineux et les mélodies solaires, il y a donc aussi cette part d’ombre, ces souvenirs mouvants qui expliquent sans doute pourquoi ses chansons parlent autant de voyages, de départs, de quête de soi.

À Ramatuelle, le public n’a pas seulement assisté à un concert : il a été témoin d’une rencontre entre deux histoires, deux générations, deux sensibilités artistiques. Les plus sceptiques sur leur différence d’âge ont peut-être trouvé là de quoi réviser leur jugement. Sur scène, les années ne comptaient pas. Il y avait juste cette évidence : quand les voix se mêlaient, quand les regards se croisaient, le reste disparaissait.

La soirée s’est achevée comme elle avait commencé : dans la douceur, avec le sentiment d’avoir assisté à quelque chose de rare. Une parenthèse où l’amour et la musique se répondaient, comme deux forces qui, parfois, savent se passer de toute justification. Laurent Voulzy et Isaure Le Faou sont repartis ensemble, hors scène, dans la nuit estivale de Ramatuelle. Et ceux qui étaient là savent que, bien au-delà des rumeurs ou des chiffres, il reste ce souvenir précieux : celui d’une soirée où la passion, qu’elle soit musicale ou amoureuse, a balayé toutes les questions pour ne laisser qu’une seule certitude – certaines rencontres ne se discutent pas, elles se vivent.