À 69 ans, Francis Cabrel continue d’enchanter ses fans depuis sa maison discrète du Sud-Ouest. Entre sa vigne, son studio et sa femme Mariette, le chanteur cultive un art de vivre simple, loin des feux de la rampe, mais si proche des cœurs.

On le croyait discret, presque retiré. Et pourtant, Francis Cabrel n’a jamais été aussi présent dans le cœur des Français. À 69 ans, l’auteur de “Je l’aime à mourir”, “Petite Marie” ou encore “La corrida”, n’a rien perdu de son aura. Mais il a gagné quelque chose que peu d’artistes osent vraiment s’offrir : le luxe de l’authenticité, d’une vie choisie loin de la frénésie du show-business.

Depuis plus de quarante ans, il habite Astaffort, un village de 2 000 âmes situé dans le Lot-et-Garonne, en Nouvelle-Aquitaine. C’est ici, au milieu des vignes et des collines gasconnes, qu’il a bâti non seulement sa maison, mais aussi son refuge, son monde, sa vérité.

Une enfance modeste devenue source de force

Originaire d’Agen, Francis Cabrel n’a jamais tourné le dos à ses racines. Son enfance, marquée par la simplicité et l’amour des choses vraies, reste une boussole. Dans une bâtisse blanche entourée de vignes, il vit aujourd’hui avec Mariette, son épouse depuis toujours, et partage les joies du quotidien avec son frère Michel, qui l’aide à entretenir leur petit vignoble familial.

“Je n’ai jamais rêvé de strass ni de lumière artificielle. Mon rêve, c’était d’écrire des chansons et de pouvoir rester ici”, confiait-il un jour, en souriant, dans une rare interview télévisée.

Et ce rêve, il l’a réalisé en silence. Sans tumulte. Il a bâti le Studio Ephémère, niché dans sa propriété, un espace intime et chaleureux où ont vu le jour plusieurs de ses albums emblématiques : Les beaux dégâts, Des ronces et des orties, ou encore In extremis. Une preuve supplémentaire que son génie artistique s’épanouit bien loin des studios parisiens ou des palaces.

La retraite ? Une question de sagesse plus que d’âge

En 2021, dans un entretien accordé au Parisien, Cabrel a glissé une confession pleine de lucidité :

« Je pense à la retraite depuis mon premier album en 1977. »

Une phrase qui résonne presque comme une boutade, mais qui cache une réflexion plus profonde. Il y évoque notamment Jean-Jacques Goldman, retiré de la scène depuis des années :

« À mon avis, Jean-Jacques a arrêté trop tôt. Mais je comprends son choix. Moi aussi, je ne veux pas faire le disque et la tournée de trop. »

Avec 14 albums, des milliers de concerts à son actif, Francis Cabrel sait que chaque nouveau projet est un défi. Et s’il hésite encore à poser définitivement sa guitare, c’est sans doute parce que la passion, elle, ne prend jamais sa retraite.

Mais ses fans, eux, redoutent ce moment. Pour beaucoup, la simple idée qu’il n’enregistre plus de nouveaux morceaux ou qu’il ne remonte plus sur scène laisse un vide immense. Car Cabrel, ce n’est pas qu’une voix : c’est une part de la mémoire collective française.

Une vie de famille loin du tumulte

Si sa carrière est jalonnée de succès, sa vie privée, elle, est un exemple de stabilité rare dans le monde du spectacle. Mariette, l’amour de sa vie, l’accompagne depuis toujours. Ensemble, ils ont élevé leurs enfants dans ce coin tranquille du Sud-Ouest, à l’abri des projecteurs.

Sa fille, Aurélie Cabrel, a elle aussi choisi de s’enraciner à Astaffort. Elle y tient Le Square, un hôtel-restaurant moderne à l’image de la famille : simple, accueillant, sincère. Elle y propose des plats savoureux, souvent inspirés des produits du terroir, et y reçoit aussi bien des touristes que des habitants du coin. On est loin des palaces de Cannes ou des rooftops parisiens. Et c’est bien ce qui plaît.

Un engagement local, sincère et durable

Mais Francis Cabrel ne se contente pas de chanter ou de cultiver ses vignes. Il est aussi un acteur majeur de la vie culturelle locale. Il a fondé deux associations :

“Voix du Sud”, qui organise chaque année Les Rencontres d’Astaffort, un rendez-vous devenu culte pour les jeunes auteurs-compositeurs.

“Musique et Culture”, qui propose des cours de chant, de danse et de théâtre aux enfants et adolescents de la région.

Ces initiatives ont transformé ce petit village en un véritable laboratoire de la création artistique francophone. Grâce à lui, Astaffort est devenue bien plus qu’un point sur la carte : c’est un lieu de transmission, de rencontre, de rêve.

Le vignoble, symbole d’un art de vivre

Au fil des ans, la vigne est devenue une métaphore de la vie de Francis Cabrel. Travaillée avec patience, respect et humilité, elle lui ressemble. “C’est un travail de longue haleine, discret, exigeant. Mais quand on récolte, c’est une vraie fierté”, disait-il à propos de ses vendanges.

Tout comme ses chansons, son vin est le fruit du temps, de l’observation et d’une forme d’amour discret. Pas de marketing tapageur, pas de stratégie de lancement : juste une passion sincère pour la terre et ses fruits.

Une popularité intacte

Aujourd’hui, malgré les années, Francis Cabrel reste l’un des artistes les plus écoutés de sa génération. Ses chansons continuent de traverser les âges, de résonner dans les mariages, les voitures, les souvenirs.

Il est de ceux qui n’ont jamais cherché à suivre la mode, mais qui ont toujours su toucher juste. Parce que ses mots parlent d’amour, de doute, de colère ou de tendresse avec une justesse rare. Parce que sa voix, reconnaissable entre mille, est un écho familier, rassurant.

Une existence fidèle à lui-même

Francis Cabrel n’a jamais eu besoin de scandales, de buzz ou de coups médiatiques. Sa plus grande force, c’est la cohérence. Il chante ce qu’il vit, il vit ce qu’il chante. Et dans un monde où tout s’accélère, où tout se vend, son choix de ralentir, de s’enraciner, de transmettre… est une leçon silencieuse mais puissante.

Alors oui, peut-être qu’il ne fera plus “le disque de trop”. Peut-être qu’un jour, il décidera que le rideau doit tomber. Mais tant qu’il y aura des vignes à Astaffort, un studio aux murs chaleureux, et des jeunes à guider, Francis Cabrel ne sera jamais vraiment à la retraite.