Héritage Delarue : 13 ans après, le fantôme du fisc hante la nouvelle vie de sa veuve, Anissa

Treize ans. Une éternité à l’échelle de la télévision, ce monde qui fabrique et dévore ses idoles à une vitesse effrénée. Pourtant, treize ans après sa disparition tragique en août 2012, le nom de Jean-Luc Delarue résonne encore avec une force intacte. “L’homme à l’oreillette”, le producteur de génie, l’animateur surdoué et tourmenté de “Ça se discute”, reste une figure indélébile du paysage audiovisuel français. Mais aujourd’hui, si son nom refait surface, ce n’est pas pour célébrer sa mémoire, mais pour une affaire bien plus terrestre : une bataille judiciaire et fiscale à plusieurs millions d’euros qui place sa veuve, Anissa Delarue, sous les feux des projecteurs qu’elle fuit depuis une décennie.

L’affaire, complexe et technique, vient de connaître un tournant décisif. La justice administrative a donné raison au fisc français, qui réclame à Anissa Delarue un redressement fiscal colossal. Le nœud du problème ? La valeur de Reservoir Prod, la poule aux œufs d’or fondée par Jean-Luc Delarue, au moment de son décès.

Pour comprendre, il faut remonter le temps. À la mort de l’animateur, sa fortune est estimée à 22 millions d’euros. En tant que son épouse – ils s’étaient mariés quelques mois seulement avant sa mort – Anissa hérite de la moitié de ce patrimoine, l’autre moitié revenant à son fils, Jean, né d’une précédente union. Dans l’actif de la succession figure la pépite de l’empire : la société de production Reservoir Prod. Au moment de régler les droits de succession, Anissa et les exécuteurs testamentaires évaluent la société à 9,5 millions d’euros. Un montant conséquent, qui sert de base au calcul de l’impôt dû à l’État.

Jusqu’ici, rien que de très normal. Mais c’est deux ans plus tard, en 2014, que l’histoire se corse. Reservoir Prod est vendue. Et le prix de cession n’est pas de 9,5 millions, mais de 14 millions d’euros. Une plus-value de 4,5 millions en à peine deux ans. L’écart est suffisamment important pour que les sirènes d’alerte retentissent dans les bureaux de l’administration fiscale. Pour le fisc, la conclusion est simple : la valeur de la société a été délibérément sous-évaluée en 2012 afin de minimiser les droits de succession. S’ensuit un “redressement fiscal”, une notification réclamant la différence d’impôt, assortie de pénalités.

Refusant cette interprétation, Anissa Delarue a contesté ce redressement devant la justice. Ses avocats ont probablement plaidé que la valeur de Reservoir Prod était intrinsèquement liée au génie de son fondateur. Sans Jean-Luc Delarue aux commandes, la société, privée de son âme créatrice, valait objectivement moins en 2012. La vente à un prix supérieur deux ans plus tard pourrait s’expliquer par un contexte économique plus favorable ou par la stratégie d’un acheteur qui pariait sur l’avenir. Mais l’argument n’a pas convaincu. En juillet 2025, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête, validant les méthodes de calcul et la position du fisc. Un coup de massue pour la veuve de l’animateur. Ses avocats, contactés, n’ont pas souhaité faire de commentaire, mais un appel de la décision reste possible.

Cette affaire vient brutalement fracasser la nouvelle vie qu’Anissa s’était méticuleusement construite, loin, très loin du tourbillon médiatique qui avait accompagné ses années avec Jean-Luc. Après la mort de son mari et la douloureuse guerre de succession qui l’avait opposée au père de l’animateur, elle avait choisi l’ombre et la discrétion. Partageant sa vie entre la quiétude de la Suisse et l’effervescence d’Istanbul, elle a tourné la page.

Avec sa sœur, elle a co-fondé Ana Khel, une marque de maroquinerie de luxe, se réinventant en femme d’affaires et créatrice. Un projet personnel, une façon de construire son propre nom, de ne plus être seulement “la veuve de”. Mais le passé, surtout lorsqu’il brasse des millions d’euros, a la peau dure. Ce redressement fiscal est un rappel brutal que l’héritage de Jean-Luc Delarue n’était pas seulement un patrimoine, mais aussi un fardeau de dettes et de complexités fiscales.

Treize ans après, le testament de l’enfant terrible de la télé n’a pas fini de livrer tous ses secrets, et surtout, toutes ses factures. Pour Anissa Delarue, ce verdict est plus qu’une défaite financière. C’est le fantôme de son passé qui revient frapper à sa porte, la forçant à replonger dans une histoire qu’elle pensait avoir laissée derrière elle. La bataille pour sa tranquillité n’est peut-être pas encore terminée.

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