“C’était prétentieux” : Les confessions de Kendji Girac sur le rôle qui l’a terrifié et transformé

Il est l’une de ces étoiles dont l’ascension semble n’avoir connu aucun nuage. Depuis sa victoire éclatante dans “The Voice”, Kendji Girac enchaîne les succès, les disques de platine et les tournées triomphales avec une aisance déconcertante. Son sourire communicatif, sa guitare et sa voix chaleureuse ont fait de lui une icône populaire, un artiste familier et rassurant. Pourtant, derrière cette image lisse et parfaite, se cache un homme qui, comme tout le monde, doute, hésite et a peur. Récemment, le jeune papa a été confronté à un défi si grand, si intimidant, qu’il a failli y renoncer, se jugeant lui-même “un peu prétentieux” de simplement oser l’envisager.

L’onde de choc n’est pas venue d’une nouvelle chanson ou d’un album surprise, mais d’un scénario. On a proposé à Kendji Girac de troquer son micro contre une paire de gants de boxe pour devenir la tête d’affiche d’un téléfilm ambitieux pour TF1, intitulé “Champion”. L’offre était de taille : porter sur ses épaules le rôle principal de Zack, un jeune menuisier passionné par le noble art, mais qui cache une blessure profonde, un secret honteux : il est illettré. Pour la plupart des artistes, une telle proposition est une consécration, une chance en or de montrer une autre facette de leur talent. Pour Kendji, ce fut d’abord une source d’angoisse intense.

“Quand on me l’a proposé, je me suis dit : ‘à mon âge, c’était un peu prétentieux’”, a-t-il confié avec une franchise désarmante. Cette petite phrase révèle un monde de doutes. Lui, l’artiste adulé, se sentait soudain illégitime. Passer de la scène aux plateaux de tournage, de l’interprétation de ses propres chansons à l’incarnation d’un personnage complexe et tourmenté, lui semblait un pas de géant, peut-être un pas de trop. La peur de décevoir, de ne pas être à la hauteur des attentes du public et des professionnels, le paralysait. Le syndrome de l’imposteur, ce mal qui ronge tant de talents, frappait à la porte de celui que l’on pensait à l’abri de tout.

Alors, qu’est-ce qui a bien pu le faire changer d’avis ? La réponse se trouve non pas dans l’ambition, mais dans le cœur. Car le combat de Zack contre l’illettrisme a résonné en lui d’une manière extraordinairement personnelle. Ce n’est un secret pour personne, Kendji a souvent évoqué avec pudeur ses propres difficultés scolaires, ayant quitté les bancs de l’école très tôt pour suivre la tradition des gens du voyage. Le thème du téléfilm n’était donc pas anodin ; il touchait une corde sensible, une “cause qui me tenait à cœur”, comme il le dit lui-même.

Soudain, le défi n’était plus une question d’ego ou de carrière. Il devenait une mission. En prêtant ses traits à Zack, Kendji Girac ne jouait plus seulement un rôle, il devenait le porte-parole de millions de personnes qui, en France, vivent dans l’ombre avec ce même fardeau. Il pouvait donner une voix à ceux qui n’en ont pas, mettre en lumière un handicap invisible et briser un tabou. La peur était toujours là, mais elle était désormais transcendée par un objectif plus grand, plus noble. “Ça me faisait un peu peur et c’est pour ça que je l’ai fait”, explique-t-il. Cette phrase résume sa transformation : faire de sa plus grande crainte son plus puissant moteur.

Accepter le rôle a été la première étape d’un long voyage. Pour devenir Zack, Kendji a dû se réinventer. Il s’est plongé corps et âme dans la préparation, suivant un coaching intensif pour apprendre les rudiments du métier d’acteur et se glisser dans la peau de ce boxeur qui utilise ses poings pour masquer sa vulnérabilité. Le personnage de Zack est un miroir complexe : sa force physique sur le ring contraste violemment avec sa fragilité face aux lettres. C’est un homme qui doit apprendre à baisser la garde, non pas face à un adversaire, mais face à ses propres limites, surtout lorsqu’il tombe amoureux et que son secret menace d’éclater au grand jour.

Cette nouvelle aventure artistique survient à un moment charnière de sa vie personnelle. Devenu père d’une petite Eva Alba en 2021, sa vision du monde et de ses responsabilités a changé. Ce rôle de composition est aussi une façon de montrer à sa fille, et à son public, qu’il est possible de se dépasser, d’affronter ses démons et de grandir. Il ne s’agit plus seulement de divertir, mais aussi d’inspirer.

En acceptant de montrer ses failles, Kendji Girac se révèle plus humain et attachant que jamais. Il prouve que la véritable force ne réside pas dans l’absence de peur, mais dans la capacité à la surmonter. Le chanteur au sourire éternel a laissé entrevoir l’homme sensible qui se cachait derrière, un homme qui, malgré la gloire, n’a pas peur de se dire qu’il n’est peut-être pas à la hauteur, avant de puiser en lui les ressources pour l’être. Le public découvrira bientôt Zack, le champion de boxe. Mais le véritable champion, c’est peut-être Kendji lui-même, celui qui a remporté le combat le plus difficile : celui contre ses propres doutes.