C’est l’une des énigmes judiciaires les plus obsédantes de ces dernières années en France. La disparition de Delphine Jubillar, cette infirmière de 33 ans, mère de deux enfants, volatilisée dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 à Cagnac-les-Mines, continue de hanter les esprits. Alors que le procès de son mari, Cédric Jubillar, s’ouvre enfin en ce mois de septembre 2025, un nouveau livre, “L’affaire Jubillar, un crime parfait ?”, co-écrit par la journaliste Elina Rostan, Dominique Rizet et Stéphane Simon, vient jeter un pavé dans la mare. Au cœur de cet ouvrage explosif : une révélation technique inédite qui pourrait bien être la clé de voûte de l’accusation.

Le Contexte d’une Disparition Mystérieuse

Pour comprendre l’ampleur de ce rebondissement, il faut revenir aux faits. Delphine et Cédric, un couple en instance de divorce, vivent sous le même toit dans une atmosphère électrique. Delphine a refait sa vie, elle aime un autre homme et projette un avenir radieux. Cédric, lui, voit son monde s’effondrer : il risque de perdre sa maison, sa femme et son confort matériel. Le mobile est là, classique, brutal : la jalousie et la peur du déclassement.

Cette nuit-là, Cédric affirme avoir été réveillé par les pleurs de sa fille et avoir constaté l’absence de sa femme. Mais son comportement intrigue immédiatement les enquêteurs. Pourquoi a-t-il lavé une couette en pleine nuit ? Pourquoi les gendarmes le retrouvent-ils en train de fixer le hublot de sa machine à laver à 5h du matin ? Pourquoi la voiture de Delphine est-elle garée dans le mauvais sens, vitres embuées de condensation ? Autant d’indices troublants, mais aucune preuve matérielle directe. Pas de corps, pas d’arme, pas de sang.

La Bombe à Retardement : Les 17 Coordonnées GPS

C’est là qu’intervient la révélation majeure du livre d’Elina Rostan. Une analyse approfondie des données téléphoniques a mis en lumière un élément stupéfiant, resté dans l’ombre depuis le début de l’instruction. Il ne s’agit pas seulement de l’activité du téléphone connu de Cédric, mais de traces numériques antérieures au drame.

Les avocats des parties civiles ont découvert l’existence de 17 coordonnées GPS strictement identiques, enregistrées entre le 14 novembre et le 16 décembre 2020. Ces points géographiques ne mènent ni à un chantier, ni à une adresse connue, mais à une zone boisée isolée, près d’un lieu-dit. La précision est chirurgicale : à six décimales près, ce qui équivaut à la taille d’une pièce.

Comment ces données ont-elles pu atterrir sur le compte Google de Cédric ? L’explication avancée dans le livre et qui sera débattue par les experts au procès est celle du “second téléphone”.

La Théorie du Téléphone Fantôme

L’hypothèse est digne d’un thriller technologique. Cédric Jubillar aurait pu posséder un second appareil, dépourvu de carte SIM, servant exclusivement à des repérages. Ce téléphone, indétectable par les antennes relais classiques car ne bornant pas, aurait été utilisé avec une application de type “Boussole” ou de géolocalisation, téléchargée via son compte Google habituel.

Le piège numérique se referme ainsi : en téléchargeant une application depuis le Google Play Store, l’utilisateur connecte tous ses appareils au même compte. Si Cédric a utilisé ce téléphone “secret” pour se repérer dans la forêt avant le meurtre, ou la nuit même, l’application a pu enregistrer sa position. Plus accablant encore, lorsque les gendarmes lui demandent d’utiliser son téléphone officiel le matin de la disparition pour géolocaliser sa femme, l’ouverture de l’application aurait provoqué une synchronisation immédiate des données entre les deux appareils. C’est ce “cloud” invisible qui l’aurait trahi, archivant les déplacements de son téléphone fantôme directement sur son téléphone officiel.

Des Témoignages et des Confessions Accablants

Au-delà de la technique, le dossier s’appuie sur des éléments humains poignants. Le petit Louis, fils du couple, a livré un témoignage glaçant, racontant une violente dispute au pied du sapin de Noël. Les voisines, elles, assurent avoir entendu des cris de terreur féminins déchirer la nuit.

De plus, le profil psychologique de l’accusé se dessine à travers ses propres mots. En prison, Cédric aurait fait des confessions à un codétenu, mais aussi à ses nouvelles compagnes. À l’une d’elles, il aurait même mimé la scène du crime au parloir, décrivant avec une précision effrayante comment étrangler une personne sans qu’elle puisse crier, avant de la menacer de subir le même sort si elle le trahissait.

Vers la Vérité ?

Alors que le procès doit durer quatre semaines, la bataille s’annonce féroce entre l’accusation et la défense. La défense de Cédric Jubillar ne manquera pas de souligner l’absence de cadavre et de qualifier ces preuves de circonstancielles. Pourtant, la “reine des preuves” ne sera peut-être pas l’ADN cette fois-ci, mais bien la téléphonie.

Si la justice valide l’expertise du second téléphone et de la synchronisation GPS, cela prouverait non seulement la culpabilité de Cédric, mais aussi la préméditation de son acte. Les coordonnées menant à ce bois isolé pourraient-elles enfin permettre de retrouver le corps de Delphine et d’offrir une sépulture à cette mère de famille ?

Comme le souligne Elina Rostan, il est terrifiant de penser qu’en 2025, le crime parfait puisse encore exister. Mais la technologie, froide et implacable, a peut-être gardé en mémoire ce que l’homme a tenté d’effacer. Le procès qui s’ouvre ne juge pas seulement un homme, il tente de répondre à une question insupportable pour les proches de Delphine : où est la vérité ?