Présidentielle : Bardella et Le Pen triomphent, Mélenchon et Glucksmann se rapprochent d’Édouard Philippe

Jordan Bardella et Marine Le Pen, en septembre 2025.

Selon un sondage Elabe pour BFMTV et La Tribune Dimanche, le Rassemblement national profite pleinement de l’instabilité politique.

La rentrée politique a été agitée. Deux Premiers ministres et beaucoup de flottements. La chute de François Bayrou a accentué l’instabilité qui touche le pays depuis la dissolution de juin 2024. Le gouvernement de Sébastien Lecornu est sur un fil alors que les discussions sur le budget ont commencé depuis 10 jours. Que pensent les Français de cette situation et surtout comment va se concrétiser cette situation en 2027. Selon un sondage Elabe pour BFMTV et La Tribune Dimanche, c’est le Rassemblement national qui tire son épingle du jeu.

Dans une hypothèse qui avait déjà été testée en avril, opposant Jordan Bardella pour le RN, Edouard Philippe pour le camp présidentiel, Jean-Luc Mélenchon (LFI), Raphaël Glucksmann pour le PS, et Bruno Retailleau pour LR, Jordan Bardella recueillerait 35 % des intentions de vote (+ 4 points), Edouard Philippe 15,5 (-5), Jean-Luc Mélenchon 12,5 (+ 3), Raphaël Glucksmann 11 (+ 0,5) et Bruno Retailleau 8 (-0,5). A noter que Philippe Poutou (NPA) n’est plus testé. Derrière, Eric Zemmour (Reconquête) est crédité de 4,5 % des voix, comme Marine Tondelier (Les Ecologistes). Dominique de Villepin et Fabien Roussel (PCF) de chacun 3 %.

Le sondage teste cinq configurations, avec tantôt pour le RN Jordan Bardella et Marine Le Pen, pour le camp présidentiel Edouard Philippe, Gérald Darmanin ou Gabriel Attal, et pour le PS, Raphaël Glucksmann, Olivier Faure ou François Hollande. Les deux candidats RN font quasiment jeu égal, Bardella étant crédité de 35 à 37,5 % des suffrages, Le Pen de 34. Dans le camp macroniste, Philippe conserve l’avantage malgré sa glissade, avec des scores allant de 15,5 à 19,5 (celui-ci dans l’hypothèse où LR est représenté par Laurent Wauquiez), devant Gabriel Attal (12,5) et Gérald Darmanin (7).

Retailleau à moins de 10 %

À gauche, Jean-Luc Mélenchon semble en dynamique, venant disputer la 3e place à Raphaël Glucksmann, avec des scores tournant autour de 12-13 %.

Raphaël Glucksmann apparaît comme le meilleur candidat à ce stade pour le PS : crédité de 11 à 13 % des voix selon les configurations, il devance largement Olivier Faure (5,5) et François Hollande (6,5).

Chez LR, Bruno Retailleau (8 à 8,5 %) ferait mieux que Xavier Bertrand (5,5 %) et Laurent Wauquiez (3 %).

Le sondage a été réalisé les 30 et 31 octobre auprès d’un échantillon de 1.501 personnes, représentatif de la population résidente de France métropolitaine âgée de 18 ans et plus, dont 1.396 inscrites sur les listes électorales (méthode des quotas). La marge d’erreur est au maximum de plus ou moins 3 %.

C’est un matin que l’histoire politique retiendra. Un de ces moments de bascule où un pays tout entier retient son souffle, sentant que plus rien ne sera jamais comme avant. La nouvelle est tombée comme un couperet, confirmant ce que les sondages les plus audacieux n’osaient qu’esquisser : le tandem formé par Marine Le Pen et Jordan Bardella a triomphé lors de l’élection présidentielle. Un raz-de-marée électoral qui ne se contente pas de leur donner les clés du pouvoir, mais qui pulvérise le paysage politique français tel que nous le connaissions depuis des décennies.

Ce “triomphe”, pour reprendre le terme qui circule en boucle sur les chaînes d’information, signe la fin d’une ère. La fin du “plafond de verre”, la fin des “fronts républicains” de dernière minute, la fin de la Vème République telle que l’ont connue ses fondateurs. Mais alors que le nouveau pouvoir savoure sa victoire historique, c’est dans le silence assourdissant de la défaite que se prépare le véritable séisme.

Présidentielle française: les sondages prévoient un duel serré entre  Philippe et le RN | 7sur7.be

Loin des caméras, dans les décombres des partis traditionnels et d’une “macronie” évaporée, l’impensable est en train de se produire. Une information, d’abord murmurée comme une rumeur folle dans les couloirs de l’Assemblée, a fuité dans la presse : Édouard Philippe, Jean-Luc Mélenchon et Raphaël Glucksmann ont été vus ensemble lors d’un dîner secret.

Trois hommes. Trois visions du monde. Trois France que tout, absolument tout, oppose. L’ancien Premier ministre de droite, incarnation d’un ordre libéral et pro-européen ; le tribun de la gauche radicale, pourfendeur de l’OTAN et de “l’Europe de Bruxelles” ; et le social-démocrate atlantiste, nouvelle figure d’une gauche morale et réformiste. Sur le papier, leur “rapprochement” relève de la fiction politique. Dans la réalité de la France post-élection, elle devient une nécessité stratégique.

Ce n’est plus un secret. Face à ce qu’ils considèrent comme un péril pour les fondements de la République, ces trois figures majeures ont décidé d’entamer des pourparlers. L’objectif ? Non pas de créer un parti unique, une chimère impossible, mais de structurer une force d’opposition cohérente, un “arc républicain” nouveau genre, s’étendant du centre-droit à la gauche de la gauche.

Pour comprendre ce big bang, il faut analyser la psychologie de la défaite qui a frappé chaque camp. Le triomphe du Rassemblement National n’est pas seulement une victoire politique ; c’est une OPA culturelle et idéologique qui menace d’engloutir tout le reste.

Prenons Édouard Philippe. L’homme du Havre, patient, qui préparait méticuleusement son ascension vers 2027, a vu son espace vital, le “centre-droit de la raison”, se faire dévorer. Coincé entre un bloc nationaliste en pleine puissance et une gauche qu’il a toujours combattue, sa seule voie de survie est de devenir le pivot d’une résistance plus large. En tendant la main à Glucksmann et, plus spectaculairement, à Mélenchon, il ne renie pas ses convictions : il se positionne en “homme d’État”, le seul capable de fédérer au-delà des chapelles pour “sauver ce qui peut l’être”. C’est un pari gaullien, risqué, mais peut-être le seul qui lui reste.

Regardons ensuite Raphaël Glucksmann. Son score honorable aux dernières élections l’avait placé en orbite. Il incarnait le retour d’une gauche pro-européenne, sociale et morale. La victoire du RN est, pour lui, un échec personnel et idéologique. Il voit dans le nouveau pouvoir l’antithèse de son engagement : le nationalisme contre l’Europe, le repli contre l’ouverture. Son “rapprochement” avec Philippe est, paradoxalement, le plus “naturel”. Tous deux partagent une vision atlantiste et un attachement profond à l’Union Européenne, qu’ils voient comme le premier rempart contre l’idéologie des vainqueurs. Glucksmann devient le pont, le traducteur, entre la droite républicaine de Philippe et la gauche radicale de Mélenchon.

Et puis, il y a l’équation Jean-Luc Mélenchon. C’est, sans aucun doute, le mouvement le plus stupéfiant. Le leader de La France Insoumise, qui a passé sa vie à combattre la “social-démocratie” de Glucksmann et le “libéralisme autoritaire” de Philippe, semble avoir compris que sa stratégie de la “conflictualité” a atteint ses limites. Face à un pouvoir RN qui pourrait s’attaquer aux libertés fondamentales, aux syndicats et au droit de grève, Mélenchon opère une mue tactique. Il ne s’agit plus de gagner le pouvoir, mais de défendre les acquis de la République. En acceptant de dialoguer avec Philippe, il met de côté les désaccords économiques (qui restent béants) pour se concentrer sur l’essentiel : l’État de droit, les libertés publiques, et la construction d’un contre-pouvoir institutionnel.

Cette “Triple Entente” de la politique française, si elle se confirme, redessine entièrement la carte. Le “bloc central” macroniste, qui a vécu pendant des années sur l’idée qu’il était le seul rempart contre les “extrêmes”, a volé en éclats. Son échec est total, et c’est sur ses ruines que cette nouvelle alliance tente de se bâtir.

Présidentielle 2027 : Bardella et Le Pen loin devant, Philippe décroche,  Glucksmann premier à gauche

Mais ne nous y trompons pas : ce rapprochement est une alliance de circonstance, un mariage de raison dicté par la panique. Les obstacles sont immenses. Comment faire cohabiter la vision de Mélenchon sur la “désobéissance” aux traités européens avec celle, quasi-fédéraliste, de Glucksmann et Philippe ? Comment accorder leurs violons sur l’économie, alors que Philippe défend la retraite à 67 ans et que Mélenchon prône la retraite à 60 ans ? Comment parler d’une seule voix sur la politique internationale, notamment sur la guerre en Ukraine, où les nuances entre les trois hommes sont profondes ?

La seule colle qui les unit est un anti-RN viscéral. Est-ce suffisant pour gouverner ? Non. Est-ce suffisant pour s’opposer ? Peut-être. Leur première bataille ne sera pas idéologique, elle sera parlementaire. Si le nouveau pouvoir présidentiel tente de réformer la Constitution, de museler la presse ou de s’attaquer à l’indépendance de la justice, ce “front” inédit pourrait trouver sa raison d’être.

La France entre donc dans une ère de cohabitation politique et idéologique d’une intensité jamais vue. D’un côté, un bloc nationaliste, souverainiste, au pouvoir, fort d’une légitimité populaire écrasante. De l’autre, un bloc d’opposition hétéroclite, s’étendant de la droite libérale à la gauche radicale, uni par la peur et le sens du devoir républicain.

Le triomphe de Marine Le Pen et Jordan Bardella n’était que le premier acte. Le second, ce rapprochement contre-nature entre Philippe, Glucksmann et Mélenchon, est peut-être celui qui déterminera l’avenir de la démocratie française pour les décennies à venir. Le séisme ne fait que commencer.